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NOM, PRÉNOM(S) Olive (non, ce n'est pas une blague...) Martin (mais appelez-le Matt) Willworth. ÂGE Déjà 24 ans. DATE ET LIEU DE NAISSANCE Le 4 novembre, à Salem... en Ohio ! LIEU DE RÉSIDENCE Londres, Angleterre. ORIGINES Américaines. MÉTIER/ÉTUDES « Profileur ». Non, je ne blague pas. Ce monsieur est payé pour tracer un portrait psychologique de divers criminels dangereux. STATUT SOCIAL Célibataire. Comment on parle pas de ça ? Oh. Classe moyenne, mais le gouvernement britannique finance les moindres de mes caprices.CÉLÉBRITÉ SUR L'AVATAR Ian Somerhalder. GROUPE Gorgeous Revolvers, au déplaisir de plusieurs.

❝ That's clever. Is it clever? Why is it clever? ❞

ALORS, COMMENT TE SENS-TU A L'IDÉE DE RETOURNER SUR CETTE FAMEUSE ÎLE ? CA FAIT.. OULA.. TRÈS TRÈS LONGTEMPS, PAS VRAI ? Absolument. Mais j'ai toujours aimé m'y rendre. Il y a quelque chose de malsain, sur cette île, un sentiment... Je sais que je ne devrais pas avoir hâte de m'y rendre, mais je ne peux pas m'en empêcher. C'est irrationnel, mais bel et bien présent. WOW, QUEL ENTHOUSIASME ! MAIS AU FAIT, LUIS ANDERSEN N'ÉTAIT PAS CENSÉ ÊTRE MORT ET ENTERRÉ DEPUIS UN BAIL ? C'est ce qu'on dit, en effet. Je suis cependant bien placé pour savoir qu'il ne faut pas se fier à ce qu'on nous dit. J'ai essayé de faire quelques recherches, avant de partir, mais je n'ai pas pu trouver d'explications. OUAIS.. CURIEUX TOUT CA. TU M'AS L'AIR D'ÊTRE UN(E) EXCELLENT(E) CHANTEUR(EUSE), CHANTES-MOI QUELQUE CHOSE. Chanter ne fait pas vraiment partie de mes habiletés, désolé. Par contre, j'ai travaillé longtemps dans les labos, je sais autopsier les cadavres, analyser les projections de sang, ne rien oublier sur une scène de crime... Comment ça ne vous intéresse pas ? C'est bon... Alors je vous fais un truc instrumental ! Non ?

YUARK, PIÈTRE PERFORMANCE. JE ME SUIS VISIBLEMENT TROMPÉ. ET, DIS-MOI, QU'EST-CE QUE TU COMPTES FAIRE UNE FOIS SUR BLOCK ISLAND ? C'est mon patron qui m'a obligé à m'y rendre. Comme quoi je ne prends pas suffisamment de vacances. Foutaises. Il n'y a que mon travail qui m'intéresse vraiment, de toute façon... Alors à moins que des meurtres ne se produisent sur l'île... UNE CHOSE EST AU MOINS SÛRE, TES CORDES VOCALES N'ÉGALENT PAS TES AMBITIONS. JE PEUX DONC TE SOUHAITER UN BON SÉJOUR ? Si tu veux, mais j'en doute. Ils vont encore me trouver bizarre, c'est certain. Les asperger n'ont malheureusement pas la cote, chez les gens normaux. Comme quoi je serais trop direct, dépourvu de sens de l'humour et même méchant... Bon d'accord, c'est peut-être une vérité. Mais c'est d'abord de leur faute à eux. Ils ont fait de mon enfance un enfer. Je n'ai pas toujours été un salaud en puissance, vous savez ? OH ! ET, PETITE QUESTION SUPPLÉMENTAIRE, PAR CURIOSITÉ. TU AIMES LES FILMS D'HORREUR ? Non. On n'y retrouve aucun scénario digne de ce nom, je leur préfère les romans policiers, le seul intérêt des films d'horreur résidant dans la violence qu'on y trouve.

Spoiler:

ASPERGER'S SYNDROME autism spectrum disorder that is characterized by significant difficulties in social interaction, along with restricted and repetitive patterns of behavior and interests.

Comment vous parlez pas anglais ? C’que vous êtes nul. C’est bon, je vous explique ! En gros, l’Asperger, c’est un trouble du développement qui fait partie du spectre autistique. Par contre, ça n’a pas grand-chose à voir avec l’autisme, rassurez-vous. Les gens atteints de ce syndrome ont divers troubles au niveau de la communication. Ces troubles peuvent se manifester de diverses façons, et être plus ou moins légers. Aussi, la plupart des asperger sont obsessionnels vis-à-vis leurs intérêts, leurs passe-temps, auxquels ils s’attachent et dont ils ne veulent plus se départir. Ainsi, certains d’entre eux se mettront à lire sans arrêt, d’autres se passionneront pour les insectes, d’autres auront des rituels importants impossibles à passer outre et d’autres deviendront obsédés par les tueurs en série…

Matt a été diagnostiqué asperger dès l’enfance, bien qu’il ne soit pas un cas particulièrement lourd. Dans son cas, ça se manifeste surtout par une grande difficulté à saisir la gestuelle humaine. Les câlins, baisers et autres démonstrations affectives le mettent mal à l'aise : il n’y comprend pas grand-chose. Très direct, il lit toujours le malaise et la tristesse trop tard sur le visage de son interlocuteur; le tact est absent chez lui. Ce n’est pas qu’il soit méchant, égoïste ou dépourvu d’humour. Simplement, il n’est jamais arrivé à communiquer normalement avec qui que ce soit et, à force, on oublie de faire des efforts, et ça va de mal en pis. Contrairement aux psychopathes, qui ne ressentent rien du tout, Matt peut ressentir toute la palette d’émotions offerte aux êtres humains. C’est probablement ce qui achève de le rendre malheureux. Il ressent les émotions, il a simplement beaucoup de mal à les montrer. Enfin… les positives. Du côté de l’indifférence, du sarcasme, de la froideur, de la moquerie et toutes leurs cousines, il est devenu un véritable champion. Ça ne veut cependant pas dire qu’il ne ressent pas la tristesse, l’ennuie, la déception, la honte et même, parfois, l’amitié et l’amour.

C'est un lourd fardeau à porter, lorsque, enfant, on tente de se faire des amis. Lorsque, adolescent, on tombe amoureux pour la première fois. C'est un lourd fardeau à porter tout au long de sa vie et, si les choses se passent mal, il est tout naturel de se fermer comme une huître, n'est-ce pas ?

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- Mon chéri, je te présente Isabelle. Elle a exactement le même… problème que toi.
- Elle est laide. Ses yeux font peur.

Les yeux de Sarah, mère de son état, s’agrandirent de stupeur. Ce n’était pas la première fois que son fils, âgé de seulement six ans, laissait échapper une énormité, mais elle ne s’y habituerait probablement jamais. La jeune femme posa les yeux sur la petite fille. C’est vrai qu’elle était laide. Son œil gauche louchait et elle souriait bêtement. On voyait tout de suite que quelque chose clochait chez elle… Alors que Martin… Martin avait tout d’un enfant ordinaire. Il avait l’air adorable, avec ses cheveux bruns foncés et ses yeux d’un bleu profond dans lesquels on pouvait se perdre. On lui aurait donné la lune en échange d’un sourire. Sarah murmura quelques mots d’excuses à Mira, la mère de l’enfant, avant de prendre son fils par la main, l’emmenant à sa suite. Elle avait depuis longtemps renoncé à le punir : il n’y pouvait rien.

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- MARTIN WILLWORTH !

Le garçon en question leva les yeux vers son père, l’air perdu. Il avait encore fait quelque chose qui lui avait déplu, apparemment. Le truc, c’était de deviner ce que c’était. Les mains dans les poches, il s’approcha de son père, n’osant ni lever les yeux, ni baisser la tête. Il regardait donc droit devant lui, sans rien dire. Tourne la langue sept fois avant de parler, tourne la langue sept fois avant de parler, tourne la langue sept fois avant de parler… Matt était si concentré à éviter de dire n’importe quoi que plusieurs secondes furent nécessaires à sa compréhension des mots prononcés. « Tu restes avec ta mère ou tu pars avec moi ? » Dix mots. Pas un de plus pas un moins. Le garçon ne pouvait penser à autre chose qu’au fait qu’il soit étrange que la question la plus difficile qu’il eut jamais entendue jusqu’ici ne soit composée que de dix mots. Rester avec sa mère, dans le confort de leur petit village de l’Ohio. Rester avec sa mère et vivre une vie tranquille. Sa mère ne lui reprochait jamais rien; elle l’aimait tellement. Partir avec son père et vivre une vie ponctuée de reproches incessants. Partir avec son père et voir le monde. Ce pays, de l’autre côté de l’Océan, où les gens prononcent les mots comme s’ils découpaient soigneusement chaque syllabe. Partir avec son père et alléger la vie de sa mère, enceinte d’un autre papa. Partir avec son père et laisser derrière lui une maman plus heureuse, qui n’aurait plus à s’inquiéter de lui, de son fils qui dit toujours n’importe quoi.

- Je pars avec papa. Je n’aime pas Louis.

Louis c’était le nouvel amoureux de sa mère. Celui qui avait séparé ses parents. Il ne voulait pas vivre avec lui. Il ne voulait pas avoir un petit frère. De toute façon, techniquement, ce ne serait que son demi-frère.

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- Tu vas voir, tu t’y feras vite.
- Il y a déjà deux ans que j’habite ici.
- Oh. Excuse-moi. Tu avais l’air tellement paumé. Je t’ai pris pour un touriste.

Matt ne répondit rien du tout. Parce qu’il ne savait pas quoi répondre. Il n’avait pas l’habitude qu’on l’aborde, comme ça. Il était sagement assis sur son banc, à l’aéroport, à observer la pluie. Il n’avait rien demandé à personne. Pourtant, la jeune fille pris place juste à côté de lui. L’adolescent posa ses yeux sur le sol. Elle retirait ses talons aiguille. Il leva la tête vers elle : elle souriait. Elle avait un beau sourire. Et elle paraissait l’apprécier. Matt décida qu’il devait faire un effort, rien que cette fois.

- Je m’appelle Matt.
- Moi c’est Ophélie.

Il avait parlé plutôt froidement, même s’il ne l’avait pas fait exprès. Il n’avait simplement plus l’habitude. Après avoir été bousculé pendant toute son enfance, n’importe qui ferait la même chose, n’est-ce pas ? Pourtant, elle lui avec répondu avec chaleur. Ce jour-là, Matt décida qu’Ophélie était le plus beau prénom qui soit.

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- Tu ne comprendrais pas.
- Alors explique-moi !
- Ça ne servirait à rien, Ophélie, à rien.

L’adolescente posa ses deux mains sur les épaules de son ami. Elle lui adressa un sourire. C’est fou ce qu’elle aimait quand il prononçait son nom, en entier, comme ça. Il était le seul à le faire, à ne pas utiliser ses mille et un surnoms ridicules. Comme elle s’y attendait, celui-ci perdit tous ses moyens. Matt ne comprenait rien aux contacts physiques, ça faisait partie de sa personnalité.

- Dis-le, tu te sentiras mieux, après.

Elle avait parlé d’un ton plus doux, presque caressant. L’adolescent se tenait raide, il ne pouvait pas s’empêcher de réagir ainsi. Ce n’est pas qu’il n’aimait pas qu’elle le touche simplement… Simplement, il ne s’y habituait pas. Personne d’autre ne le faisait. Ophélie attrapa sa main.

- Je suis amoureux de toi.

Ni tambours, ni feux d’artifices. Pour la première fois, ce fut Ophélie qui ne sut pas quoi dire. Elle se tint là, immobile, indifférente. Elle tourna les talons. Matt ne devait plus jamais la voir en Angleterre. Il garderait de son premier aveu d’amour le souvenir d’un rejet total, d’une bonne amie – la seule – perdue.

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- Il ne veut pas te voir, Ophélie.

Matt pouvait l’entendre parler. Elle se tenait dans le hall d’entrée, tout en bas de l’escalier. Lui, perché au-dessus de la balustrade, écoutait sans rien dire. Son père disait vrai, il ne voulait pas la voir. Il avait trop honte, était trop déçu, trop en colère… À dire vrai, il ne savait plus.

- Mais je pars, demain…

Le cœur de Matt manqua un battement. Il allait se précipiter vers les marches, quand la voix de son père, réconfortante, le ramena à la raison.

- Écoute, Ophélie, vous vous verrez à l’île très bientôt, de toute façon.

Et elle était partie. À ce moment-là, ni l’un ni l’autre ne savait que Luis Andersen allait mourir, peu de temps après, les empêchant de se revoir sur l’île.

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- J’ai eu une offre d’emploi, papa.
- Où ?
- Le gouvernement.
- C’est bien payé ?
- Suffisamment pour que tu n’aies plus besoin de m’aider.
- Ce n’est pas ce que je voulais dire, tu le sais.
- Bien sûr que c’est ce que tu voulais dire. Ça ne fait rien, papa. C’est un boulot intéressant, profileur.

Les deux hommes étaient assis dans le minuscule appartement qu’ils partageaient. Matt n’avait jamais eu le moindre intérêt pour l’université. Il avait bien été rat de laboratoire pour le service policier pendant quelques mois, mais c’était un travail trop ennuyeux, trop facile… Et on ne le laissait pas en apprendre plus sur les enquêtes en cours. On n’écoutait pas ce qu’il avait à dire. Il avait été appelé le matin même. Le gouvernement était tombé sur son blog, où il exposait ses théories sur des meurtres récents, très médiatisés. Il avait émis l’hypothèse que tous ces meurtres étaient liés. Et il avait raison. Il travaillerait désormais pour le gouvernement britannique.

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- Je veux que tu prennes des vacances, Matt.

- Si je voulais des vacances, je les aurais demandées.

- Je sais… Mais tu en as besoin. J’ai vu l'invitation que tu avais laissée sur la table, il y a deux jours.

- Je ne vois pas de quoi tu parles.

- On sait tous les deux que tu ne l’aurais pas laissée là si tu n’avais pas voulu que je la vois.

C’était vrai. Quelque part au fond de lui, Matt voulait retourner sur l’île, dans l’espoir futile mais bien réel d’y trouver Ophélie. Seulement, il ne l’avouerait pour rien au monde, et c’est pourquoi il se fit un devoir de n’accepter qu’à contrecœur, après maintes protestations, et seulement après que son patron l’ait assuré que les nouveaux stagiaires ne toucheraient pas à ses affaires en son absence.